La bande à Baader


LA BANDE A BAADER


Réalisé par Udi Edel
Écrit par Bernd Eichinger




« Chronique des années de plombs » ou comment retracer le parcours mythique de la RAF (Fraction Armée Rouge, appelée communément « la bande à Baader », du nom de l’un de ses leaders), de sa création en 1968 jusque dans sa descente aux enfers. Un (long) film d’un réalisme sans concession ni bons sentiments parfois dur à encaisser. Qui sont les gentils, qui sont les méchants ? Dans un monde où personne ne s’écoute, ne subsistent que violence et terreur.
Au commencement, une plage, tranquille, deux fillettes qui jouent dans l’eau sous l’œil protecteur de leur mère feuilletant un magazine « people ». Cette séquence anodine cache en fait les prémices du mouvement révolutionnaire. On apprend plus tard que la mère n’est autre qu’Ulrike Meinhof, journaliste connue pour ses prises de position d’extrême gauche, qui lit dans la presse la venue outrageante du shah, symbole de l’impérialisme, en Allemagne. On se met alors aussitôt du côté des étudiants révoltés, mais clairement pacifiques à ce moment-ci, lors du défilé d’accueil, et qui sans ménagement se font agresser par les forces de l’ordre. Tous essaient de fuir, mais vite on se retrouve dans un champ de bataille où les civils sans défense, terrorisés, se font violemment tabasser. Mais bientôt tout se disloque.

Abandonnant leurs familles, un groupe se constitue autour d’Ulrike Meinhof et Andreas Baader. Leur volonté est de chasser définitivement le fascisme afin de retrouver une société humaine libre. Idée louable en théorie, mais Udi Edel choisit de ne pas trop s’attarder sur les motifs pour relater en bloc les faits. Il nous livre une succession d’images, dont beaucoup d’archives documentaires, toutes plus sanglantes et accablantes d’inhumanité. Des personnages apparaissent, disparaissent, tués, tueurs, anonymes, membres de la bande ou de l’Etat. Les éditos d’Ulrike qui offraient des (espoirs d’) explications sont eux aussi noyés dans cette terreur, si bien qu’on ne sait plus qui les écrit, pour quoi, pour qui… Les fondateurs du groupe sont bientôt arrêtés mais les actions continuent à l’extérieur (attentats aux J.O de Munich, détournements d’avion…). La population soutient majoritairement la RAF. Mais tout déraille encore, tensions à l’intérieur des groupes, prises d’otages qui se transforment en massacres, conditions d’emprisonnement déplorables (les blessés meurent vite, laissés sans soins)…
La fin arrive presque comme une délivrance, étrange sentiment en vérité, alors que toutes les têtes tombent, des deux côtés, suicides ? Meurtres ? Là n’est plus la question, la mort est violente, brutale, désespérée. le film brouille quelque peu nos repères historiques et jusqu’à notre bon sens moral. Ici, pas de raisons, on ne sait plus rien, on assiste juste avec horreur à la déshumanisation du monde, au chaos. Destruction du mythe rebelle de la bande à Baader, Etat incapable de garantir liberté, sécurité, droits fondamentaux de l’Homme. Démonstration des plus pessimistes de la nature humaine.

Tout ça n’est pas très enthousiasmant mais un film comme celui d’Udi Edel, qui fait polémique en Allemagne, est important à défendre.

Ana Kaschcett

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