Eden à l'Ouest


EDEN A L'OUEST


Réalisé par Costa-Gavras
Avec Riccardo Scamarcio, Eric Caravaca, Ulrich Tukur...




Elias est un émigrant clandestin comme tant d’autres, qui pense trouver – comme l’indique le titre – « l’Eden à l’Ouest ». Pour le moment, sa vision de l’Eden se résume à trouver un travail qui lui permette d’avoir une vie décente.

Pour cela, il est prêt à beaucoup, même à vendre son corps. Car le diable a quelques atouts : une détermination et un courage inébranlables, et une beauté solaire qui suscite l’envie et le désir de tous ceux qu’il croise, hommes et femmes confondus. Il n’en profite pourtant pas outre mesure ; par exemple, il ne se résigne pas à voler la femme qui le protège en échange de faveurs particulières. Car Elias est l’incarnation même du mythe du Bon Sauvage : aussi pur que naïf, et ne gardant aucune réelle rancœur contre ceux qui lui ont causé du tort, tel un animal. Un personnage assez monochrome, somme toute. Le type même du gendre idéal mesdames, version fauché et sans toit.

Tout au long du film, Elias enchaîne les aventures rocambolesques qui rythment sa survie. Son bu+t : la ville lumière, dans laquelle officie un magicien qui lui a lancé « Si tu viens à Paris, viens me voir » au cours d’une tournée estivale en Europe. Pour son malheur, Elias l’a pris au mot… Il est donc de mainmise que le jeune homme ira de déconvenues en déconvenues au cours de ce périple, ce qui donne à Costa-Gavras l’occasion de distiller ça et là un état des lieux de la fracture sociale européenne. Malheureusement, le réalisateur ne fait que survoler tous les thèmes qu’il aborde, et semble résigné à n’en attaquer aucun pour de bon.

Le film reste donc bancal mais attachant, à l’image de son personnage principal, qui fait l’expérience du choc des cultures, que ce soit en manquant de se faire renverser par le TGV ou en repêchant à la main la perruque d’une riche cliente d’un complexe hôtelier dans des toilettes pleines de fiente.

Costa-Gavras a cependant eu la bonne idée de ne jamais identifier son héros à une culture particulière, et lui fait même parler une langue inventée pour le film au détour d’une scène. Elias est et restera donc apatride bien qu’indiscutablement européen, à l’image d’une des premières scènes, où lui et d’autres clandestins jettent leurs pièces d’identité déchirées dans la mer Egée. Belle image que de placer son histoire dans un des berceaux de la civilisation européenne, d’autant que cette même civilisation, en cherchant aujourd’hui à effacer ses frontières intérieures dans le cadre d’enjeux économiques, laisse pour compte certaines des identités multiples qui la composent.

Judith Arazi

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