Une Famille Brésilienne


UNE FAMILLE BRÉSILIENNE


Réalisé par Walter Salles et Daniela Thomas
Scénario de Daniel Thomas, George Moura et Braulio Mantovani




Le film porte bien son titre puisque le réalisateur de Carnet de voyage dresse ici le portrait d’une famille représentative du Brésil d’aujourd’hui dont l’aspect documentaire est évident. C’est avec un réalisme brut que Salles nous entraîne dans le quotidien de cette famille pauvre dont la vie de chacun des membres reflète une des facettes de la difficulté de s’en sortir lorsque l’on est pauvre dans ce pays. Cette réalité est dépeinte avec justesse, sans aucune emphase d’émotion, et c’est peut-être ce qui manque à ce film : un peu moins de distanciation vis-à-vis des personnages, afin que ceux-ci puissent mieux exister et le spectateur plus s’impliquer dans l’histoire.

L’intention première du film est réussie : nous sommes plongés dans la réalité du Brésil pauvre d’aujourd’hui. Cinq personnages nous sont présentés : la mère, Cleuza, et ses quatre garçons, tous nés de pères différents. Cleuza est de nouveau enceinte et semble porter son ventre comme un fardeau ; donner la vie est devenu le reflet d’un désespoir, car elle sait qu’elle n’aura pas l’argent pour élever correctement cet enfant. Elle fait pourtant de son mieux et s’inquiète pour ses fils qu’elle a élevé avec courage. Mais ceux-ci ne semble plus trouver de repère au sein de leur famille disparate et se cherchent ailleurs. Thomas et Salles insistent sur l'individualisme de l'existence des membres de la famille, chacun ne gérant que ses préoccupations propres sans vraiment se soucier de celles des autres. Reginaldo, le plus jeune, cherche obstinément son père ; Dario rêve d'une carrière de footballeur mais il est déjà trop vieux pour s’inscrire ; Dinho se réfugie dans la religion tandis que l'aîné, Denis, déjà père d'un enfant, gagne difficilement sa vie et se risque à la délinquance. Mais dans la description de ces situations difficiles les deux réalisateurs affirment leur regard sensible et humain et ne se laissent jamais aller dans le misérabilisme et nuancent le portrait de chacun. Ainsi une dose d’espoir est donnée car ces quatre garçons, coûte que coûte, gardent leurs buts en tête, cherchent à leur vie un sens qu'ils ne trouvent pas forcément dans leur famille proche. La fin du film est comme une fenêtre ouverte sur l’avenir, leurs avenirs qui s’éloignent de la vie bouchée qui semblait devoir être la leur.

L’intention deuxième du film, qui était peut-être celle de toucher le spectateur témoin des difficultés rencontrées par ces personnages, n’est malheureusement pas totalement atteinte. Impossible évidemment de rester de marbre face à tant de pauvreté et de misère mais la volonté des réalisateurs de traiter toutes les facettes de ce thème noie quelque peu leur sujet dans un catalogue trop exhaustif. Il manque juste un peu d’âme à ce film, toutefois intéressant pour son témoignage.

Dorothée Jouan

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