Vengeance


"MY DAUGHTER... MY SON IN LAW... MY GRAND-CHILDREN... AND I.
LET'S TAKE REVENGE !!"


"Vengeance
"

Réalisé par Johnnie To
Écrit par Johnnie To et Wai Ka-Fai
Avec Johnny Hallyday, Anthony Wong, Simon Yam, Lam Suet, Lam Ka-Tung et Sylvie Testud





On sonne à la porte... Trois assassins entrent en massacrant père, mère et enfants. Aussitôt arrivé à Macao, Francis Costello engage trois tueurs professionnels afin de faire payer ceux qui ont décimé la famille de son unique fille. Le problème est que ce vieillissant chef de restaurant français perd progressivement la mémoire... Si Vengeance n'est pas le meilleur film de son réalisateur, il n'en demeure pas moins un polar de qualité, comme Johnnie To a dorénavant l'habitude de nous en livrer.

L'intérêt majeur de cette histoire ne repose pas tant sur le recrutement de Johnny Hallyday, du reste assez correct, dans le rôle principal, mais plutôt sur la perte de mémoire qui prend de plus en plus d'ampleur chez cet homme au visage marqué par la vie. Que veut dire l'expression « se venger » ? La question qui semblait de prime abord ridicule prend une toute autre signification, si l'on oublie ce pourquoi nous avons pris les armes. Rencontre après rencontre, Costello prend moult photos et y grave des noms pour ne pas oublier les visages. On ne saurait alors dire s'il veut simplement mener son objectif à bien, en combattant son amnésie progressive, ou s'il refuse catégoriquement d'oublier la tragédie de sa famille, afin de la venger coûte-que-coûte.

La question se pose d'une autre manière pour le trio de tueurs, incarnés par des acteurs de pointe du cinéma local. En choisissant d'aller bien au-delà de leur contrat, l'appât du gain ne peut plus constituer leur seul mobile, car ils sont conscients qu'ils n'en sortiront pas vivants. Les scènes de gunfights aussi inventives que dynamiques se succèdent, depuis la fusillade au clair-de-lune jusqu'à ce climax superbement chorégraphié dans la décharge publique, où le toujours remarquable Anthony Wong ne peut s'empêcher de rire, en réalisant jusqu'à quel point ils ont pu changer en si peu de temps.

La passion de cinéphile qui anime Johnnie To, jusqu'à donner au héros de son film le même nom « Costello » que le célèbre Samouraï de Jean-Pierre Melville, ne procurerait pas autant de plaisir coupable si le cinéaste et son fidèle scénariste Wai Ka-Fai ne possédaient pas une telle maîtrise formelle. La brutalité la plus âpre ne se départit ainsi jamais d'un humour que l'on sait cher au réalisateur, de même que le désespoir qui hante ce vieil homme, seul face à ses ennemis, se voit sauvé par une famille d'enfants habitant sur la plage avec leur mère, tel un havre de paix plus spirituel que matériel. Après l'oubli du visage, reste en tête une vengeance dénuée de cible, comme un objet frisant l'abstraction, jusqu'à ce qu'elle disparaisse à son tour de la mémoire, pour ne laisser la place qu'à un sourire et une sérénité enfin retrouvés.


Pierre-Louis Coudercy



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