Rachel se marie

écrit par Jenny Lumet, réalisé par Jonathan Demme avec Anne Hathaway, Rosemarie DeWitt, Bill Irwin…




Jonathan Demme, éminent réalisateur du grand Philadelphia, livre une parenthèse intime ; Rachel se marie, porté par le jeu déséquilibré et nerveux d’Anne Hathaway. Plus qu’un énième film romantique sur le mariage, il fait figure de docu-fiction intelligent et émouvant autour d’un drame familial.

Kym (Anne Hathaway), internée dans un hôpital pour drug addicts, débarque dans son immense maison de campagne à l’occasion du mariage de sa sœur, Rachel (Rosemarie DeWitt). Demme choisit de filmer caméra à l’épaule pour suivre au plus près les festivités, se plaçant ainsi en témoin réaliste. Le film, basé sur le scénario accompli de Jenny Lumet, suit, avec sensibilité, la fragilité psychologique de Kym. Elle, entourée mais seule, se détache des autres, comme hantée par un fantôme. L’excellente Anne Hathaway, joue à merveille la fille complètement paumée dans un univers qui lui échappe, ce qui donne lieu à des moments de cocasseries drolatiques comme son discours tortueux au repas familial ou l’agacement qu’elle éprouve envers des musiciens malheureusement trop actifs. Kym, éternelle fumeuse aux cheveux sales, souffrant de profondes névroses liées à un passé trouble, attire vite l’attention générale. Demme multiplie les zooms sur une Anne Hathaway déphasée par son entourage, qui dans un accident final, matérialise son obsession morbide... Nourrie par l’amour trop possessif de son père et abandonnée par une mère agressive, Kym s’avère être le triste maillon d’une famille qui vole en éclats. Seule Rachel, incarnation lumineuse du bonheur, trouve un équilibre salutaire auprès de son mari (Tunde Adebimpe, accessoirement, le chanteur de TV on the Radio). Autour d’une famille de gentils timbrés (voir le paternel s’adonner à une course de vaisselle avec son futur gendre est jubilatoire), Rachel, heureuse jeune mariée, se démarque par sa sérénité candide. Le film, finalement, est une célébration du mariage festif dans sa forme la plus débridée ; ici, la mariée n’est pas traditionnellement en blanc, mais en sari… Toutefois, les disputes familiales - plus vraies que nature - s’enchaînent, où la douleur refait surface. Rachel se marie alterne donc la joie et la tristesse avec justesse. Le film trouve ainsi sa place auprès du cinéma indépendant américain, qui comprend les Juno, Little Miss Sunshine etc., en reprenant un mélange fameux de drôlerie mesquine et de fraîcheur délurée. Toutefois, Rachel se marie reste un film sombre où le secret et la culpabilité de Kym, et de ses proches, se déterrent. Comme une caractéristique propre au cinéma de Demme, l’incompréhension, l’incapacité de toute communication, donnant lieu à une tristesse presque mélancolique, est toujours là.

Roseline Tran


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